Mis en ligne par le Dr Muriel BENICHOU

Rappelons tout d’abord les tenants et aboutissants de cette polémique qui a vu le jour en 2013

En février 2013 paraissait le livre polémique de Philippe Even « la vérité sur le cholestérol »contestant l’intérêt pourtant démontré des statines en prévention des accidents cardiovasculaires. Dans ce livre, Even affirme que le cholestérol n’a pas la dangerosité que lui attribue généralement la communauté médicale. Il remet en cause le traitement de l’hypercholestérolémie en particulier par statines chez les patients ayant déjà fait un accident cardiovasculaire (prévention secondaire) mais aussi en prévention dit primaire c’est-à-dire chez les patients à haut risque cardiovasculaire mais n’ayant pas fait d’accident cardiovasculaire. Dans son argumentaire à charge contre les statines, il met en avant leurs effets secondaires notamment musculaires.

Face à cette controverse la Haute Autorite de Santé (HAS) a publié en février 2013 un communiqué de presse clarifiant son point de vue sur les statines et leur utilisation. Elle y affirme que le bénéfice des statines en prévention secondaire et dans le cas des patients à haut risque en prévention primaire ne peut être remis en question.

Cette polémique a laissé des traces      

En 2017 des chercheurs de l’université de Bordeaux ont cherché à estimer la proportion des patients ayant interrompu leur traitement suite à la publication du livre de Philippe Even. Ils se sont pour cela basés sur l’échantillon généraliste des bénéficiaires (EGB) , une base de données de l’assurance -maladie qui constitue un échantillon représentatif de 650000 personnes. L’idée des chercheurs était de vérifier l’arrêt effectif des statines dans les 9 mois qui ont suivi la publication du livre de Philippe Even et de le comparer avec celui des 2 années précédentes. En effet, chaque année certains patients interrompent leur traitement indépendamment des polémiques pour des raisons personnelles ou médicales. Ce taux d’arrêt était de 8,5% en 2011 et en 2012 mais a grimpé à 11,5% en 2013 soit une hausse de 40% ; une hausse de la mortalité a aussi été observée en particulier dans les groupes à moyen et haut risque.

En conclusion       

Sept ans après la polémique, les statines sont toujours prescrites en prévention primaire et secondaire et leur efficacité n’est pas remise en cause par la majorité de la communauté scientifique et médicale.

Elle a cependant conduit à des arrêts intempestifs de traitement et à une hausse de la mortalité .

Elle a laissé des traces chez les patients qui continuent de ressentir une certaine méfiance lorsque le mot statine est évoqué en consultation limitant ainsi leur adhésion à un traitement pourtant essentiel pour limiter le risque cardiovasculaire.